Christian Favre, président 
Christian, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est au collège de Ste–Marie à Martigny à 14/15 ans avec mon prof d’alors M. Yves Closuit. Il m’a inculqué les prémices du jeu, que j’ai goûté avec passion. Je participe alors à quelques tournois sur le plan valaisan après avoir gagné celui interne du collège… et le virus n’est pas parti.
Ensuite il y a eu l’avènement du club de Leytron dans lequel, en tant que bon leytronain, je me suis inscrit. A ce moment-là, je mets fin à de petites années d’inactivité. Par contre je ne participe à aucun tournoi, car ma vie de footballeur (1L et LNA) me prend beaucoup de temps.
En 1995, à l’occasion de la fondation du club de Riddes-Leytron par Patrick Crettaz, je me suis impliqué corps et âme à ce jeu et à ce club. Depuis 2008 j’en suis le Président. Par passion et par volonté j’assure depuis 2010, une formation de base pour les enfants de Riddes et environs…
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
Une détente et une sérénité. Il me permet d’oublier le quotidien. Il me vide la tête. Je suis content de voir les copains du vendredi et… ceux des championnats valaisans parce qu’on ne parle pas de la même chose en jouant ! Je prends autant de plaisir ici à Riddes qu’en tournoi populaire. Dans le fond que je perde ou gagne, sur le moment c’est plaisant… ou pas. Mais après Pfft !
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Je n’en ai pas de marquants. Je ne me fais aucune fixette là-dessus. Mais pour y répondre je dirai en toute modestie : lorsque j’ai battu Eddy Beney en partie rapide, alors qu’il affichait près de 2100 Elö au compteur.
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Quand j’avais du physique, le foot était toute ma vie. J’ai été joueur et/ou entraineur au : FC Leytron, Stade-Lausanne, FC Sion, FC Riddes, FC Isérables, FC Chamoson, FC Saillon pendant une bonne vingtaine d’années. Mais à force de courir après le ballon, j’avais la tête qui tournait. Il y avait saturation. Tandis qu’aux échecs on court moins, mais souvent en rond !
Une autre passion ce sont les abricots. J’en fais du jus de fruit, de l’abricotine et de l’abricotine aux œufs. Depuis peu, je m’occupe avec amour de mon premier petit-fils en lui enseignant les lettres de A à H et les chiffres de 1 à 8…
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Est-ce une anecdote de dire que depuis que je remets mon titre de Président de club de Riddes-Echecs en jeu, tout le monde se marre !
Pourquoi es-tu le seul joueur valaisan « inscrit » à ne pas avoir de Natel ni d’adresse e-mail ?
C’est un choix personnel. Je ne veux pas être envahi par ce monde que nous n’arrivons pas à maitriser. Car dès que nous mettons une main dedans, nous nous éloignons de la beauté des choses qui nous entourent. Je ne veux pas avoir le nez collé sur ces écrans. Je veux lever la tête pour voir où je vais.
Je ne joue quasiment pas aux échecs sur ordinateur (tu perds tout le temps) ; je préfère voir la tête de mon partenaire quand je joue un sale coup.
Les livres sont plus enrichissants, je crois, qu’Internet. Le livre, tu peux le humer, le palper. Il ne se casse pas et ne tombe jamais en panne.
Nicolas Moret, membre actif
Nicolas, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
Grâce à mon papa (Roland) et Gino Dumoulin. Certain jour Gino passait à la maison pour faire de la musique avec mon papa (un peu), boire un coup avec mon papa (beaucoup) et jouer aux échecs (surtout) avec mon papa. Je retrouve Gino au Cycle de Leytron parce qu’il enseigne les échecs avec Yvon Défayes. Alors de voir mon père se disputer pour savoir si deux Blanches étaient plus fortes que quatre Noires : j’ai décidé d’apprendre correctement et de jouer les arbitres pour départager papa et Gino.
J’ai pratiqué jusqu’à l’âge de 15 ans et puis j’ai tout laissé tomber. C’est en intégrant le club de Riddes en 2010 sous l’impulsion de papa, qui est membre depuis quelques années déjà, que j’ai vraiment pris la peine de m’y intéresser et de consulter sur le sujet.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
J’adore ce jeu parce que je ne réfléchis plus à autre chose. Je n’ai plus de souci quand je pousse les pièces. Quand je vois les 64 cases, cela m’enlève tous les tracas du quotidien. Quand j’étudie des positions, l’exercice me prend tout mon cerveau, il me vide complètement la tête : mais attention, faut pas croire que j’ai la tête vide quand je joue avec un partenaire ! Nuance !
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Mes deux nulles en CVE parties semis-rapides à Riddes en 2015 contre Ludovic Zaza et J-Paul Moret et ma victoire contre Yves Roduit ! Rien que ça ! Trois exploits en 45 minutes et tout la même journée. C’était euphorique. Pas mal. J’ai eu une demi-érection ! (Gros rires !).
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Je vis une agréable vie de famille avec mon épouse et mes deux enfants. Mon fils et ma fille poussent les pions ici, à Riddes. Je pratique beaucoup la pétanque et le Pastis 51. Je ne chasse pas. Ne fais pas de pêche.
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Lors de mon seul tournoi à Sion, à la table d’à côté, il y a un gars qui pose la question à son partenaire en disant : « Est-ce que ce sont les Noirs qui commencent ou les Blancs ? Est-ce que c’est moi ou toi qui commence ? » Moi, en entendant cela je m’écroule de rire sous la table. Pendant 10 minutes je n’ai pas pu jouer quoique ce soit. Je n’arrivais plus à me concentrer. C’était horrible. J’ai trop ri. (Rires).
Jean-Luc Monnet, joueur kamikaze et secrétaire
Jean-Luc, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est un ravaleur de façades qui travaille chez mon gd-père en 1970 qui, lors de ses moments de pauses, s’essaye à me l’apprendre. Puis mon papa est devenu mon partenaire, sans qu’il sache trop, quoi et comment. En 72, je suis fasciné par l’historicité du match Spassky-Fischer. Je fouille les quotidiens à la recherche de leurs parties que je commente sur mon échiquier. J’achète le fameux Marabout des Echecs de Fritz van Setters que j’use encore aujourd’hui.
Au Cycle, c’est avec Yvon Défayes, que je commence sérieusement à savoir de quoi sont faits les échecs. Yvon me donne de bonnes bases. Grâce à ça, je gagne deux ans de suite le championnat interne du Cycle. Après l’école obligatoire,
la musique et l’athlétisme prennent le dessus. Je ne pratique plus. Je reste passionnément intéressé par les tournois des candidats et les finales entre les trois K.
En 1995, lorsque que Riddes-Leytron se crée, j’adhère au club pour le fun. Je ne croche pas trop. Christian me rappelle en 2006. Depuis je deviens presque malade si je ne peux pas participer à une séance de jeu le vendredi soir.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
C’est un vide-grenier. Surtout que le vendredi j’ai une journée difficile, professionnellement parlant, alors je me fais un point d’honneur à me vider la tête en fixant des petits bouts de bois complètement agités qui bougent dans tous les sens.
Depuis 2009, je m’occupe du CVI (de la coupe valaisanne). C’est une petite porte ouverte sur le monde échiquéen du canton que j’apprécie beaucoup.
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Lors de mon 1er Open de Martigny en 2008 (je ne suis pas encore classé). Je fais une catastrophique mise en place de mon Fou en fianchietto. Mon partenaire (1543 Elö) ne s’en prive pas. Sa Dame, telle une ogresse, bouffe tout ce qu’elle trouve sur son chemin : Fou, Tour et 2 pions ! Super ! Comme j’ai « perdu la partie» après seulement 8 coups, je pousse les pièces en toute tranquillité, attendant le châtiment suprême… Au trentième coup, je mate mon adversaire !
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
De beaucoup de musique. Depuis mes 10 ans je souffle dans une trompette. Après fanfares et autres pompes musicales, je suis, depuis 1991, membre à temps plein du Val Big Band Orchestra de Martigny (voir www.valbigband.ch). Je gratte également la guitare. Je partage avec ma compagne l’éducation de notre fils.
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
J’ai remarqué lors de mes voyages extra-muros, qu’aussi bien à Stockholm, Santiago du Chili, Buenos Aires, Wellington, Londres qu’à Jaipur, dès qu’il y a, dans un parc, une table avec un carré de 64 cases dessus, il y a foule autour. Ce jeu est sacrément universel et unificateur. Le plaisir de partager (même un blitz) avec un inconnu de passage est créateur et apaisant. Belles expériences d’amitiés furtives.
Philippe Droz, l’homme des bois
Philippe, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
A l’âge de 15 ans. C’est un ami qui m’a expliqué quelques règles et qui m’a motivé pour ce jeu. J’y ai joué longtemps par plaisir, sans bouquiner les tonnes de livres sur le sujet. Puis j’ai joué 5 ou 6 ans au club de Martigny, c’est à ce moment-là que j’ai ouvert mon premier livre de théorie pour apprendre l’ouverture et quelques technicités du jeu pour avoir de bonnes bases. Je n’ai pas pris de cours spécifiques au jeu, je suis un autodidacte des échecs. Puis à force de me frotter contre de meilleurs joueurs que moi, j’ai appris.
Je quitte Martigny pour incorporer le club de Riddes avec lequel je joue maintenant depuis environ 20 ans.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
De l’évasion. Quand je franchis la porte du local, j’arrive dans un autre monde ; l’extérieur n’existe plus. Il n’y a pas seulement le plaisir du jeu, il y a aussi la joie de rencontrer des amis et de partager socialement la folie de ce jeu.
Les échecs me sont une bonne occasion à l’entrée du week-end pour casser le côté physique de la semaine. Je suis bûcheron (c’est sport !) et pousser des petits bouts de bois me permet de me recentrer sur ce que je vis.
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Je n’ai pas de souvenir particulier en rapport avec les échecs ; mais s’il m’arrive à titiller un Elö meilleur que moi, je suis content. Si j’arrive à le mettre en difficulté c’est un plaisir. Si je parviens à faire mieux que lui, mon égo est content. Par contre si l’Elö est plus faible et donc « moins fort » que moi et que je perds, là mon égo prend un coup.
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Je partage spirituellement et socialement ma croyance en mon église, avec un collège de personnes, avec lesquelles je discute du complément que tout cela amène à notre vie et la dimension que nous voulons donner à celle-ci.
A part cela, comme tout bon valaisan je fais un peu de ski et accorde une bonne place à la vie de famille que je partage avec mon épouse et mes enfants.
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Cela m’arrive de me faire bouffer ma Reine sans que je ne m’en aperçoive. Je suis tellement concentré sur ce que je vais faire et non sur ce que va faire mon partenaire que je ne vois que du feu ! Il doit toujours avoir un équilibre entre ce qu’il fait et ce que je joue. En plus, c’est d’autant plus fâcheux que, quand la personne qui est en face de moi est supposément et mathématiquement moins bonne que moi, me pique ma Dame : c’est viscéralement frustrant.
Thierry Delaloye, mezzo voce 
Thierry, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est à l’âge de 7 ans que j’ai découvert et appris à jouer avec deux oncles. Suite à cela, je me suis inscrit au club de Leytron initié par Yvon Défayes. J’ai joué avec lui, Claudy Favre, Pierre-Joseph Christ qui sont tous instituteurs, et avaient le truc pour bien enseigner la stratégie et les rudiments du roi des jeux. Comme j’aimais ça, j’ai commencé ma collection de bouquins et j’ai travaillé.
J’ai arrêté de jouer pendant une vingtaine d’année et lorsque j’ai emménagé à Riddes, Christian m’a fait de l’œil pour que je chauffe une chaise au local. Depuis maintenant 2014, je suis aussi motivé que mes 2 enfants pour retrouver les copains du vendredi soir.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
Comme c’est un jeu de patience (comme les cartes), cela fait du bien de changer d’idées. Les échecs sont un passe-temps. Je joue tout aussi bien sur l’ordi, avec mes deux garçons qu’avec mon épouse pour le simple plaisir que ce jeu nous apporte.
Je viens à Riddes-Echecs pour voir du monde et jouer avec les copains, pour voir de nouveaux coups et apprendre de nouvelles combinazzione. Le tournoi interne est très compétitif et la journée familiale faite de 7 rondes est très ludique et festive. Même si l’on ne se prend pas le chou, on mange très bien ! De jouer en CVE est très intéressant pour moi, je vois de nouvelles têtes et apprends à les connaître.
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Avec Leytron, j’ai été champion valaisan par équipe. Lors de la dernière ronde, contre Sierre, j’ai eu l’insigne honneur au premier échiquier, de gagner le point qui nous a donné la victoire, et ce, à la surprise générale. Mes trois collègues « plus forts que moi », ont décidés de me sacrifier en 1, pour tenter de marquer 2 points sur les tables suivantes… malgré cela ils n’ont pas très brillé et c’est moi qui ai engrangé le jackpot !
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
C’est un peu bateau : du ski en famille, du VTT et tout le sport en général en live et en télévision. J’ai beaucoup œuvré pour des clubs : soit en actif, soit dans des comités (FC Leytron, FC Riddes). J’ai transpiré dans un club de basket pendant 10 ans ; j’ai été caissier de la valaisanne de basket.
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Je me souviens à l’époque où Saxon jouait le CVE, je jouais contre le Président de Saxon. La partie bat son plein lorsque je lui propose le nul. « Non, non, qu’il me dit, j’ai une qualité d’avance, on continue. » Ben pour finir il a perdu ! C’est la preuve qu’il faut toujours aller jusqu’au bout. On ne sait jamais ce qui peut se passer.
Alain Meizoz, l’ermite
Alain, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est une cousine qui en vacances au chalet familial, entre mes 10 et 15 ans, m’a appris les bases. Elle avait un petit ordinateur à piles, de l’époque de Mathusalem avec lequel tu devais attendre une ½ heure avant de pouvoir jouer ton coup. J’ai croché tout de suite.
Ensuite j’intègre le club de Leytron. Là, je me suis rendu compte que pour gagner une ou deux fois par soirées, il fallait bouquiner un petit peu. Pour comprendre, il faut avoir une grosse motivation et cette motive je l’avais ; donc j’ai lu. Mais paradoxalement, comme tout est théorique, si tu ne comprends pas pourquoi tu joues ce coup au lieu d’un autre, ce n’est pas évident de l’appliquer quand tu dois le jouer. Et pour être plus au fait de ce qui se passe dans les parties, j’ai commencé à rejouer les miennes et à voir ce qui aurait pu changer si j’avais joué tel ou tel coup. J’allais alors jusqu’à apprendre « par cœur » certaine partie en espérant que mon collègue la joue telle que et en priant Dieu qu’il ne sorte pas de la théorie : ce qui ne fut pas évident !
Au début de « ma carrière », l’ordi partageait ma passion et m’a beaucoup appris. Aujourd’hui je l’ai laissé tomber, car professionnellement j’en regarde un quotidiennement pendant 8h. Je ne veux pas encore lui faire des yeux doux le soir, pour prendre une raclée. Ah ça non !
En 95, je rejoins le club de Riddes, je participe au CVE, mais par manque de temps, je ne joue que sporadiquement.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
J’ai toujours adoré ce jeu. Pour moi c’est une passion. Quand je joue, c’est un véritable plaisir. C’est le jeu par excellence, ce qui me plait là-dedans c’est le côté JEU de la chose. Les échecs furent pour moi, dans ma jeunesse une drogue dure : et je pèse mes mots ; une drogue. Si je ne jouais pas j’en devenais malade : j’étais addicte !
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
C’est l’impression que me donne Turkmakov contre qui je joue. Moi, au bout de 20 minutes quand je « joue compète », je choppe mal à la tête. A Bagnes, il est resté prostré dans la position du penseur, la tête dans les mains, vissé sur sa chaise pendant toute la journée sans bouger d’un centimètre ! Cela m’a impressionné ! Je me suis dis que ce gars-là, y vit pas dans le même monde que moi.
Une autre fois, à Bagnes encore, (quand j’apprenais par cœur mes parties), je joue contre un GM qui joue exactement l’une d’entre elles. Je perds au temps, mais sur le plateau, il me l’a dit en fin de partie que, c’était moi qui menais.
Un autre souvenir c’est d’avoir connu Janos, notre hongrois d’adoption. C’était un chouette gars qui m’a fait connaitre plus profondément les échecs. En plus, il était bourré de cultures, d’humour et d’amour. Quand on ne parlait pas d’échecs, il avait réponse à tout. Je garde un merveilleux souvenir de Janos.
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Comme j’ai toujours vécu dans ma bulle d’ermite, j’ai vécu pour moi-même au travers de ma famille, de la nature et de la dépense physique que me procure le sport. Le reste, ce qu’il y avait autour de moi, ne m’in-té-res-sait-ab-so-lu-ment-pas. Je n’ai jamais été touché par autre chose que ce que j’avais besoin. Le sport est (et fut) une soupape qui me permet (tait) de faire péter les plombs des soucis de la semaine. Si je n’avais pas ça, je crois que je serais beaucoup moins stable. (Rires). Cette stabilité aujourd’hui, je la trouve grâce à ma femme et mon fils, qui faisant partie de sociétés locales m’obligent devenir plus sociable qu’avant. (Gros rires !)
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
A Monthey contre un certain Michellod, je joue sous pression car je suis pressé : j’ai un rendez-vous avec ma future ! Il a partie perdue depuis un moment, mais continue de jouer un max jusqu’au drapeau. Il ne veut pas me laisser partir ! Moi j’ai la rogne car je ne veux pas lui donner le point, de fait, il m’oblige à jouer jusqu’au bout. Alors je me dis : « Non, tu n’auras pas ma peau. Non, tu n’auras pas ma peau. Quitte à arriver en retard, je ne te laisserais pas gagner… ». Il n’a pas gagné ! Je suis arrivé en retard quand même, mais content ! Elle est toujours là.
Gino Jeanneret, googleman
Gino, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est à 25 ans quand je travaillais pour le compte d’une boite hollandaise à Omsk en Sibérie. Le soir, dans ce coin du monde, dans le HLM de « basse qualité » où j’habite, que veux-tu qu’on y fasse à part jouer aux échecs… Comme je ne connais pas les règles, je fais comme eux : je joue. Les gens jouaient comme ça pour passer le temps, alors moi aussi j’ai passé le temps avec eux. Je n’y ai « joué » que 6 mois, après, pendant plus de trente ans je n’ai plus caressé une reine !
Il y a une petite dizaine d’années, je me suis retrouvé au CE de Nyon. Tu peux pas savoir comment cela m’ennuyait : je n’y apprenais rien ! Mais je me suis bien amusé !
En m’établissant à Saxon, des joueurs de bistro me donnent l’envie de recommencer. De fil en aiguille un gars me parle du club de Riddes. J’y vais, j’y suis !
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
Partout où j’ai joué aux échecs, j’ai trouvé en face de moi des gens droits, corrects, honnêtes. Pour ainsi dire : il n’y a pas de gueulards parmi ces gens. On perd on perd, on gagne on gagne tout cela dans une certaine modestie : chez tous. C’est ça qui me plait.
Que tu sois toi-même ; fauché ; à ras ; directeur de banque ; SDF ; quand tu joues, tu partages avec ton vis-à-vis une grande amitié. Je remarque qu’entre les joueurs d’échecs il n’y a pas d’antagonisme : on est tous des bons copains et c’est ça qui me plait. Bon… faut reconnaitre, y’a quand même un con sur 10’000 joueurs, mais ça faut pas le dire !
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Je n’ai aucun souvenir de parties qui m’ait marqué parce que je ne peux pas me souvenir de la partie que je viens de conclure ! Il y a 30 ans lors d’un accident, mon cerveau perd le sens de l’orientation. Je n’arrive pas à replacer les choses. Tu me montres une partie, la plus part des gars arrivent plus ou moins à la refaire, à repositionner les pièces dans une situation particulière : moi pas !
Avant je ne pouvais pas me perdre dans la nature, aujourd’hui en ville je dois prendre des repères 5 ou 6 fois avant de m’engouffrer dans ses ruelles, sinon je me perds.
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
J’ai écrit et publié une demi-douzaine de livres. Aujourd’hui j’hésite à éditer les 7 bouquins que je tiens au chaud dans mon ordinateur, parce que je me rends compte de plus en plus, que les gens lisent de moins en moins. Surtout, j’écris pour mon plaisir car, au vu de l’histoire narrée dans ma dernière œuvre, je me demande qui veut bien savoir ce qui se passe chez les Mérovingiens ? A part leurs quelques descendants… et moi !
Tu te plais à Riddes-Echecs ?
Beaucoup, parce que c’est une bonne équipe de copains. Ce n’est pas un club où les gens veulent à tout prix gagner pour arriver à 2000 Elö (ils n’y arriveront jamais de toute façon !). Ils y viennent pour s’amuser et c’est encore une fois cela qui me plait.
Comment te qualifierais-tu ?
J’ai toujours été un personnage bizarre. Je me suis toujours intéressé à des choses qui n’intéressaient personne. Les sciences par exemple. Je suis en train de traduire un bouquin de physique du français en allemand, écrit par un gars qui n’a vendu que 500 exemplaires ! Je le fais parce que cela m’amuse et cela me fait travailler le cerveau. Puis comme mes yeux vont mieux, je vais reprendre la peinture. Je cubiste à fond les tubes. J’aime l’art… je dois tenir cela de mon illustre grand-père !
Patrick Crittin, caissier
Patrick, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
Je n’en ai aucune idée… C’est vrai ! Je n’ai aucun souvenir de comment j’ai appris à jouer aux échecs ! Avant de commencer, je me rappelle connaitre un peu le mouvement des pièces. A l’école je n’ai jamais eu de cours.
Puis bien plus tard j’ai partagé des parties avec mon beau-frère qui m’a expliqué l’importance du centre, enseigné les bases de la mobilisation des pièces.
Est arrivé alors, l’intéressante possibilité pour moi, (et pour les autres) de jouer contre un inconnu sur Internet. A ce moment, je prends des cours avec un joueur de Martigny pour apprendre le pourquoi des diagonales, le pourquoi des tours sur les colonnes ouvertes, pour comprendre les ouvertures et toutes les complexités du jeu. Je profite alors pour bouquiner sur le sujet. J’interromps ces cours pour causes professionnelles et à mon retour en Valais, j’intègre club de Riddes-Echecs en septembre 2016.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
Du plaisir, parce que j’aime bien jouer. Cela me permets de travailler la mémoire… (heu… heu… !) Cela me permet également de rencontrer des personnalités à l’intérieur du club. J’aime bien l’ambiance riddanne, car personne ne se prend la tête, tout le monde peut jouer contre tout le monde : c’est un peu ma façon de « voir » le jeu d’échecs ; et puis cela me permets de jouer en « live » et non via l’ordinateur/Internet. Ma vision du jeu en deux dimensions est plus difficile qu’en trois. En face d’un collègue, on peut sentir/voir la tension du jeu se répercuter sur nous, sur Internet, non.
Ici à Riddes, il n’y a pas de tension, d’agressivité, on se la joue cool.
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Je garde un souvenir intéressé du tournoi international de Bienne, que j’ai « visité » avec mon prof. J’avais été agréablement surpris par l’ambiance, parce que je m’attendais à quelque chose de strict (je n’avais jamais vu un tournoi de ma vie). J’ai été étonné qu’on puisse se balader entre les tables, prendre le temps de jeter un œil sur l’échiquier du voisin, d’aller écouter ensuite le débriefing des parties avec les joueurs.
Je n’ai par contre, pas de souvenirs échiquéens à faire valoir, car je n’ai actuellement aucune expérience compétitive du jeu, ni en Open, ni en CVi, , ni rien. Je commence juste à jouer en CVE. C’est dommage pour toi, tu ne peux pas écrire plus !
Tu connais quand même certains grands noms des échecs ?
Heu… Heu… Quelques uns… ! Heu… [Rires en cascade]. Je connais bien Euwe, car c’est lui qui a écrit mon premier livre sur le sujet. Mais j’ai plus de facilité à retenir les ouvertures que les noms de ceux qui les ont faites.
Après Spassky, champion du monde, il y a eu qui ?
Aucune idée ! … Kasparov ? Non ? (Rires sans commentaire…).
A part les échecs, de quoi est faite ta vie ?
J’ai intégré à l’insu de mon plein gré, le comité de l’UVE en tant que trésorier. Y a pas grand-chose à faire parait-il !
En souvenirs de…
Joël Chaouat, le modeste 
Joël, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est ma maman qui m’a poussé à jouer, et c’est avec mon meilleur ami Eric, à l’âge de 15 ans que j’ai débuté. Puis un jour en me baladant à Cannes j’ai lu une publicité qui disait : « APPRENEZ A JOUER AUX ECHECS EN TROIS HEURES ! »… Ben… ce fut le cas.
Vers mes 17 ans j’achète un ordi et m’inscris dans un club. Mais, oh déception je me fais massacrer ! Alors je dévore des livres, comprends mieux le truc et soudain il y a une illumination qui se produit au fond de ma tête. Cette lumière scintille toujours autant et je continue à adorer ce beau jeu que sont les échecs. Ceci m’a permis de gagner un tournoi populaire à Grandson dans mon adolescence.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
De l’assurance en moi. Une raison de vivre vu ma condition physique, et « sublimissiblement » ils m’ont fait connaître la femme que j’aime. Tu te rends compte ; je reçois une convocation pour une AG à Lausanne, moi qui habite Sion, j’y vais, et voilà que je fais la connaissance de Yota. Pas mal ça ? Qu’est-ce que t’en penses ?
Ce jeu m’a prouvé que je pouvais faire quelque chose. Comme les activités physiques me sont interdites au regard de ce que je vis, je me devais de montrer aux autres que je n’étais pas RIEN.
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Toutes les parties que j’ai gagnées contre des meilleur-e-s que moi. (Gros rires). Mais si tu me demandes quel est mon plus mauvais souvenir je te répondrais, toutes les parties que j’ai perdues contre des moins bons classés. Mais je ne m’étendrais pas là-dessus. Je suis mauvais perdant mais j’essaye de le cacher. (Gros rires encore).
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Ma vie est faite de l’amour que je porte à ma femme, Yota. Je me passionne pour les maquettes d’avions, la géographie et le cinéma. Je suis un philatéliste qui recherche les timbres racontant la vie des échecs. Je suis également un petit numismate qui affectionne les pièces en or.
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Un jour je joue avec un ami qui avait la réputation de ne jamais s’énerver (c’est ce qu’il disait). Les deux premières parties je les perds, il est tout content ; mais après sa quatrième défaite consécutive j’ai vu voler l’échiquier au travers de la pièce. Comme quoi : il faut toujours se méfier des eaux qui dorment…
Joël Chaouat nous a quitté le 3 juin 2019. RIP.
Roland Moret, le marsien 
Roland, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
En mangeant des chocolats MARS ! (gros rires)…
Dans les années 70, la chocolaterie Mars imprime au verso de leurs emballages, les déplacements des pièces et quelques bases du jeu. Alors plus je mange de Mars, plus je joue aux échecs.
Un jour, mes enfants, fréquentant le Cycle d’Orientation, disent à Gino Dumoulin qui y donne des cours… d’échecs, que leur papa (moi donc), « joue » aux échecs. Comme je connais bien, musicalement parlant Dumoule, j’invite Gino à passer à la maison.
Devant l’échiquier, il me dit : « On joue. Je ne dis rien. A la fin de la partie je t’explique le pourquoi du comment de la chose… ». Dès lors on se voit souvent… et souvent au café de la Tour… où d’autres personnes poussent des pièces et cela pendant une vingtaine d’années. J’achète alors plein de bouquins dont je ne reconnais plus les titres aujourd’hui, tellement il y a de la poussière dessus.
Je croise à Evian, vers les 2000, Christian Favre qui ne boit pas que de l’eau. Il profite de m’inviter au club de Riddes. J’y joue 1 ou 2 ans puis arrête complètement : car ma vice-présidence de commune me prend énormément de temps et d’énergie. Depuis une dizaine d’années je suis devenu un membre assidu du club de Riddes-Echecs. Voilà comment je suis arrivé aux échecs grâce au chocolat MARS.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
Hé ben… ! Quand on est plein des soucis accumulés la semaine : boulot, femme, et plein d’autres trucs de ce genre et qu’on a la chance de jouer aux échecs, on oublie tout, tout et tout. Ca me vide la tête de ne penser qu’aux échecs : on ne peut pas penser à autre chose. (Un ange passe).
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
Mon meilleur moment je l’ai vécu en décembre 2016, au tournoi valaisan Amateur : j’ai battu Hans-Peter Wyss !
Autrement, mon « mauvais souvenir » se passe au tournoi de Bagnes. Je joue avec un petit gars qui arrive juste au niveau de la table. Je constate qu’il ne sait pas trop jouer car en 15 coups je lui pique tout le bazar. Le pauvre ! Il est nu comme un ver avec son Roi. Il me fait tellement pitié ce gosse, que je commence à jouer au chat et à la souris avec lui… ben pour finir… j’arrive à le mettre Pat ! A force de « faire le guignol » avec lui, je me suis fais gauler. Alors ça ! Plus jamais !
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Ben, je vais prendre ma retraite professionnelle en mai 2017 du côté d’Euseigne en sachant qu’en 20 minutes je peux être assis derrière un échiquier à Riddes ; y a pas de police le soir je peux rouler un peu speed ! Et puis je vais réattaquer la musique et rejoindre une pompe, avec un euphonium. C’est moins pénible que le cornet à piston, mais plus lourd.
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Un ex-champion du monde arrive dans un bistro à Bienne, il se dirige vers la salle arrière où s’entraine le club local. Profitant du fait que personne ne le reconnait, il demande à jouer une partie en ayant un handicap d’une Tour. Résultat : il gagne la 1ère partie ! Lors de la 2ème partie rebelote : une Tour en moins et une victoire en plus ! La troisième partie s’engage avec le plus fort joueur du club et 3ème défaite des seelandais !
Une heure durant, après le départ de leur bourreau, les bernois (lents à la comprenaille) se demandèrent s’il est vraiment valable de ne jouer qu’avec une Tour au lieu des deux ?
Roland Moret nous a quitté le 26 mai 2018. RIP
Joseph Roggo, le doyen de la faculté 
Joseph, comment es-tu venu à jouer aux échecs ?
C’est à Fribourg, vers l’âge de 10 ans (il y a bien 80 ans de cela !), dans un jardin public, je croise des gens qui y jouent. J’ai eu envie d’en apprendre plus, mais je ne me rappelle plus comment.
Pendant mes études universitaires je suis membre du club en ville. Je gagne un tournoi interne. Puis après mon doctorat, j’arrête de jouer. Je n’ai plus le temps. Mais la passion est toujours là, intacte. Pendant mes 40 ans de sacerdoce, je ne vais jouer que 10 parties ! Une fois à la retraite, j’intègre le club de Riddes en 1995, à la seule condition de ne participer à aucun CVE. Dont acte.
Qu’est-ce que ce jeu t’apporte ?
Ce jeu m’apporte beaucoup d’amitié. Il y a une ambiance dans ce club qui est vraiment fantastique, et j’y tiens beaucoup. On peut venir quand on veut. On peut jouer contre qui on veut. On peut partir quand on veut. On peut battre qui on peut. C’est tellement passionnant et imprévisible que c’en est grisant. Cette fréquentation hebdomadaire maintient mon effort psychique ; non négligeable à mon âge. Cela me permet aussi, de laisser travailler mon imagination. Je lis la revue Europe-Echecs pour m’amuser et je suis abasourdi par la technicité du jeu d’aujourd’hui qui me passe complètement par-dessus la tête. Par contre les anciennes parties, celles de ma jeunesse, je les comprends encore !
Quel est ton meilleur souvenir aux échecs ?
C’est le 23 décembre 2016, le soir où j’ai gagné deux parties (Rires). En gros mes meilleurs souvenirs sont les dernières parties jouées avec mes amis échiquéens.
A part les échecs de quoi est faite ta vie ?
Je suis l’un des rares retraités, qui suis encore les colloques à l’hôpital. Cela m’intéresse toujours de suivre l’évolution de la médecine. Je lis toutes les semaines une revue médicale helvétique.
Je jardine tous les jours une petite heure dans le potager : y a tout le temps des mauvaises d’herbes à enlever, des taupes à chasser, courir après les limaces… J’ai quelques abricotiers (faut les tailler, les cueillir, manger les fruit… boire l’abricotine que Christian me fait ; c’est pas facile).
As-tu une anecdote issue du monde impitoyable des Blancs et des Noirs ?
Alors là oui ! J’en ai une très belle. En 55 ou 56, je suis médecin sur un bateau suédois en partance pour l’Argentine. J’ai l’occasion de jouer aux échecs avec un pasteur argentin et quelques voyageurs. Pas de chance : tout le monde se fait battre, je gagne tout ! Arrivés à Buenos Aires, le ministre me dit qu’un club de la capitale m’attend pour jouer en toute collégialité.
J’arrive au club. Je remarque que je suis accueilli dans le club du Grand Maître Najdorf, rien que ça ! Je m’aligne avec les argentins… Je me prends trois pliées de suite que tu ne te rends pas compte. De la folie. Le pasteur a passé dans son club en disant qu’il connaissait un très fort joueur. Eux, tous contents de partager un grand moment avec cette pointure européenne ( !), m’invitent. Après les trois parties, ils m’ont demandé si je n’étais pas très en forme après ce long voyage, ce que j’ai expressément confirmé.
Depuis quand fumes-tu la pipe ?
Depuis mes 16 ans. À l’époque je faisais du dessin technique en fumant des cigarettes, mais cela me piquait les yeux ; alors j’ai décidé de changer de combustion. J’ai toujours fumé des tabacs nature comme le Burrus bleu, ou depuis 30 ans maintenant, du Garibaldi ; comme mon gd-père ! En conclusion tu peux écrire que j’ai eu de la chance.
Aux échecs ?
Ah non ! Pas toujours. Mais avec la fumée oui.
Joseph Roggo nous a quitté le 21 janvier 2022. RIP